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Exposition 4 sculpteurs

10/18/2018 - 11/16/2018

L’endroit où je demeure

Est secret, retiré, difficile de le décrire

nul vent, pourtant les lichens frémissent

nulle brume, pourtant les bambous

sont toujours sombres

le ruisseau murmure sans intention

sur la montagne les nuages soudain

se rassemblent

midi, assis dans ma hutte,

je m’aperçois que le soleil vient enfin d’émerger

HAN Shan


Reçu de Paris samedi : «Ackerman et d’Agata ( photographe d’agence ) photos de corps, visages, couples, petite fille, peau, regard, yeux, bouche, toucher / je regarde pour toi, et d’autres choses encore».

Explosif d’Agata. Sexuel. Flou miné d’Ackerman. érotisme désespéré. Les deux ont parcouru le monde. Dans des endroits pas clairs où des vies bouleversantes étaient évacuées en charniers. «Correspondant d’Agence». Enfants / bien sûr / de Nachtwey ou de McCullin. De retour de vacances : le Paris des bars à putes, des chambres où des êtres se touchent, se sculptent. S’auscultent. S’aiment. Ou ne s’aiment pas. Du vivant. Désespéré. Une poésie qui sent la sueur et le sperme. L’ecchymose et la pisse. Les draps et la moquette.

Il n’y a pas d’art moderne, ni contemporain. Il y a un désespoir moderne, contemporain. Il faut pourtant lever la tête, «échouer mieux» dira Beckett, échouer encore.

Dans les photos de Christian Rappaz il n’y a rien. Il y a tout : il n’y a rien. Un songe qu’il essaie de capter. L’âme qui quitterait les lieux à cet instant précis. Peut-être / déjà / hors du cadre. Même le photographe a disparu. Lui erre. Pupilles noires. Noires. Le vide, le plein, l’énergie. La mort. La désintégration de l’ego / L’absence, le silence. Un abandon.

Où sont-ils ? Faro, Estoppey, Marolf, Raboud. Peut-être n’y a-t-il déjà plus rien à capter.

De Paris encore. Reçu : «De l’atelier de Brancusi, il n’y a plus rien à ressentir». Halle aux foires du vide planifiées à l’extrême.

à quoi tient l’absence d’une personne, l’énergie de l’être lié à un bout de pierre, à un morceau de bois, aux brasures du métal. Où part l’énergie ? Durant toute l’époque de Harald Szeemann, l’Œuvre de Joseph Beuys pouvait encore être exposée, exposable. à sa mort, pas une personne capable de continuité. Capable d’habiter les vides. Zurich : Je revois l’installation «Das Ende des 20. Jahrhunderts». La pièce est trop petite. L’Œuvre est morte, inadaptable. Je ne ressens plus rien. Un témoignage de plus pour une chose d’un temps oublié. On a pu déposer les objets de manière millimétrique, d’après des photos détaillées, rien n’est plus là.

Que deviendront les pièces de Faro, de Raboud, de Marolf et d’Estoppey lorsqu’ils seront morts. [ Je pense ]

Où se dispersera ce qu’ils ont laissé de leur aura ? Aucun monument ne demande à être épousseté chaque matin : «Il suffira d’un peu de pluie, d’un peu de vent». Inscription sur des tombes, sur des passages, sur les cénotaphes. Repos intermédiaire de l’Œuvre dans son infini suspens : aucune d’elles / véritables / ne se laissera violenter. à la mémoire des mémoriales: Se soÛler avec de la poésie frelatée. Mourir. Ne rien laisser que l’anonymat.

Inès : Qu’est-ce que vous avez ?

Estelle : Je me sens drôle. ça ne vous fait pas cet effet-là ? Quand je ne me
  vois pas, j’ai beau me tâter, je me demande si j’existe pour de vrai.

Inès : Vous avez de la chance. Moi, je me sens toujours de l’intérieur.*

J’ai travaillé pour l’institution. Dans des camps de jeunes prisonniers qui seront libérés sans caution. Aucune. Les portes de l’école s’ouvriront. Un monde vide, rétréci qui étouffe chaque être. Sa bouche immonde lipstickée de vérité sans tenant. Un immense merdier où doit survivre la poésie. Mais ce n’est pas fini. Ce qui continue ne finit jamais. Leurs pauvres mains pointées sur la tempe, ils devront avancer la moitié de la moitié de la moitié du chemin. Puis encore la moitié de la moitié.

Sentir / écouter / Toucher. Sceller avec ses lèvres les impossibilités de dire.

La poésie n’épouse jamais deux mondes frontaux. C’est que tout ne se délivre pas par le choc. La confrontation n’est pas le seul moyen. Embrasser vide et plein, ce qui les lie. Tout est couché. Tout s’élève comme une mer qui se gonfle. Regard sur une Œuvre. Regarder. Une Œuvre. Le seul péché est le manque d’attention disait Corina Bille. Donner une forme à la forme / Dieu caché dans un morceau de cire / encore peut-être.

Je reconnais ceux qui mentent mais jamais ceux qui disent la vérité. Au hasard :

éTIENNE KLEIN - MATIèRE à contredire - Essai de philo physique «Il n’y avait qu’étienne Klein, physicien et philosophe des sciences pour réussir aussi bien ce périlleux exercice.»

Yann VerDo, Les échos

éRIC FIAT - Ode à la FATIGUE «éric Fiat, philosophe érudit, poétique et pince-sans-rire, décrypte les bénéfices secondaires de l’épuisement avec une élégance toute littéraire.»

Dorothée Werner et Julia Dion, ELLE

MICHEL ONFRAY - Solstice d’hiver / Alain, les Juifs, Hitler et l’Occupation «Précis et convaincant, Onfray vise juste.»

Roger Pol-Droit, Le Monde des livres

RAPHAëL ENTHOVEN - Morales provisoires - «Avec cette collection de pin’s métaphysiques plantés dans l’air du temps, Enthoven pulvérise les certitudes, il crève les pages.»

Marine de Tilly, Le Point

Eichmann monstre de désobéissance [ Je pense ]

Je connais ceux qui mentent. Jamais ceux qui disent la vérité.

C’est qu’ils utilisent encore le médium philosophique pour calmer ou excéder la foule. Depuis «le gai savoir » de Nietzsche. La philosophie est morte. Heidegger le maudit / pour d’autres strates / autrement courbe / et pour d’autres raisons / a défini la croix que nous portons. Lorsqu’il annonce « nous sommes les sentinelles du néant», c’est pour nous fondre aussi. Le creuset / Déjà de la poésie / de la fumée d’usine.

Le reste : Un immense détournement.

Que voit Faro / dans les éclats tombés à ses pieds, dans les veines arrêtées du bois qui explose. Comment faire passer autant de colère et de douceur, d’incompréhension sourde.

où va Raboud / dans ce passage qui se déplace toujours. Un Oedipe sans guide. Même de face je vois son dos. Qui regarde / une plage / et attend. Le silence est total. Le silence. Est total. écume de sable sans plus de signe. La mer. Le sel. Boire

Julien Marolf / incorruptible. Prend le problème à l’envers. Les naissantes. Une veste posée sur son travail. Comme s’il s’agissait d’un porte-machin. Beckett, l’enfance. La naissance du mourir inversé. Une évolution vers le vide de la falaise. «Ainsi» dit-il.

Estoppey / renard timide qui connaît les fables et les faiblesses des contes à rendre à la populace qui ne se défait ni du réel ni du rêve. Mais s’évertue encore à ne pas les confondre. Grimer le romantisme. Dans la forêt décapitée : loup y es-tu ?

Et nous ?

Conscients que nous ne parviendrons jamais au bout de notre tâche sinon celle d’avoir survécu à l’illusion. D’autres, nés aussitôt après nous feront de même jusqu’à ce que la tâche ne souffre plus aucun propos plausible, c’est-à-dire mensonger. Et qu’elle nous libère enfin de son idée même.

Rien dans la poésie normative, formatée

Rien dans la folie normative, formatée.

Ailleurs !

Ailleurs ?

Chez moi.

Lors de mon séjour à Cery / département Tamaris / Section alcoolique. Reçu : «Tout, très souvent, n’est que fausse Alerte.

Et pourtant trembler toujours

Les peurs bien verrouillées

Aux chevilles fines

De l’enfant.

Goûter à d’autres liqueurs

Celles-ci bienfaisantes

à nos douloureuses poitrines

Couvertes de cerises

Mais le langage n’est pas mort»

Nicolas Marolf

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